Distributions transfrontalières de dividendes | à la recherche du bénéficiaire effectif…gare aux apparences !
Notre droit interne prévoit que les dividendes distribués par une société française à une société mère européenne sont exonérés de retenue à la source sous réserve notamment que la holding en soit la bénéficiaire effective (code général des impôts, article 119 ter). Cette exonération est en phase avec la Directive européenne « mère-fille ».
Lorsque les conventions fiscales internationales prévoient des conditions d’application plus favorables en matière d’exonération de retenue à la source, le droit interne doit s’effacer.
Toutefois, afin de lutter contre les montages artificiels visant, tant à masquer le véritable bénéficiaire de la distribution, que de bénéficier des avantages fiscaux issus des Directives européennes ou des conventions, la jurisprudence utilise la condition de bénéficiaire effectif comme arme « anti-abus ».
Ainsi, lorsqu’une holding européenne n’est qu’une structure « relais » des dividendes de source française, profitant en réalité à un bénéficiaire (effectif) établi dans un pays tiers à l’Union européenne, la jurisprudence n’applique pas les avantages fiscaux découlant de la Directive « mère-fille ».
Cependant, elle admet de tenir compte de la convention conclue entre la France et l’État de résidence du bénéficiaire effectif des dividendes (Conseil d'Etat 08/11/2024, Sté Foncière Vélizy Rose).
Les critères [non limitatifs] suivants sont utilisés pour identifier le bénéficiaire effectif :
- la holding détient l’intégralité du capital de la filiale française ayant versé les dividendes ;
- Les dividendes sont reversés le lendemain à l’associée unique de la holding ;
- la holding ne dispose pas d’autres fonds disponibles ;
- la holding n’a pas d’autre activité que celle de porter les titres de la filiale française.
Cette décision est cohérente avec une jurisprudence récente qui avait retenu globalement la même grille d’analyse pour identifier le bénéficiaire effectif de redevances (Conseil d'Etat 20/05/2022, Sté Planet).
La condition du bénéficiaire effectif devient une nouvelle arme pour lutter contre les sociétés relais dépourvues de toute substance économique. Mais, au-delà de la structuration des groupes et du rôle économique qu’une holding intermédiaire pourrait alors jouer, il faudra s’assurer que cette structure « relais » a la maîtrise des revenus passifs (dividendes, intérêts, redevances). Le réinvestissement de ces revenus dans le développement de son activité va dans le bon sens. Il en irait autrement en cas de reversement automatique ou à très bref délai…à un autre bénéficiaire effectif !